L'acteur trisomique Pablo Pineda est le héros de Yo, también, une bouleversante comédie dramatique réalisée par deux cinéastes espagnols.
Deux réalisateurs espagnols, Alvaro Pastor et Antonio Naharro, unis pour une belle histoire, émouvante et audacieuse qui bouscule les idées reçues sur le handicap, sur la différence. «Notre envie commune était de poser des questions sur la supposée normalité et d'aborder sans tabou le thème de la sexualité», explique Alvaro Pastor. Dans Yo, también, Daniel (Pablo Pineda), trisomique, rencontre Laura (Lola Duenas), «normale» mais inadaptée, qui lui fait tourner la tête et le cœur. Quelques chromosomes les séparent ? Quelle affaire ! «Nous avions déjà réalisé un court-métrage sur la problématique du handicap mental, mais nous désirions aller plus loin », confie Antonio Naharro, qui ajoute:«Je suis sensible au sujet parce que ma sœur, Lourdes, qui a un petit rôle dans notre film, est atteinte de trisomie.»
La vraie star de Yo, también, primé au Festival de San Sebastian ainsi qu'au Festival international du film de Rotterdam, c'est, bien sûr, Pablo Pineda, qui en est l'interprète touchant de vérité, d'humour et de naturel. Trente-six ans, trisomique, il est le premier Européen mentalement déficient à avoir obtenu un diplôme d'enseignement supérieur. Professeur des écoles, il s'apprête maintenant à obtenir un diplôme de psychopédagogie. «Nous nous sommes beaucoup inspirés de la personnalité de Pablo, qui a travaillé avec nous sur le scénario, explique Alvaro Pastor. Pablo est une exception. Très intelligent, il parle parfaitement bien de son syndrome. Quand il était bébé, sa mère l'a toujours stimulé intellectuellement. Il a, par la suite, suivi le cursus de n'importe quel gamin, bénéficiant d'une loi, passée il y a trente ans, permettant aux handicapés d'étudier à l'école. Il pourrait vivre seul, mais «trouve plus pratique de rester avec ses parents»
Seule ombre au tableau? «Il n'a jamais réussi à enseigner, souligne Alvaro Pastor. Pour trouver un emploi dans le public, il lui faudrait passer un concours. Quant aux écoles privées, elles sont timorées et n'osent pas l'employer. Il gagne sa vie en donnant des conférences dans des entreprises pour les convaincre d'engager des personnes déficientes.»
La bande-annonce :
LA CRITIQUE :
Daniel, 34 ans, est le premier trisomique européen à avoir obtenu un diplôme universitaire. Le voici dans un centre social de Séville pour son premier jour de travail. Il y fait la connaissance de Laura (Lola Dueñas), jeune femme un peu bohème, aussi piquante et chaotique qu'elle est indépendante. Leur amitié devient progressivement l'objet de toutes les attentions et des critiques. Refusant de se plier aux convenances sociales, ce couple singulier finira par construire une relation unique. Fondée sur l'histoire réelle de son acteur principal, Pablo Pineda, ce premier film frappe juste. Il est bien sûr difficile de ne pas penser au Huitième Jour, du Belge Jaco Van Dormael (avec Daniel Auteuil et Pascal Duquenne), ou même à Rain Man ou My Left Foot. Mais là où le réalisateur de Toto le héros choisissait la poésie et l'onirisme, cette comédie dramatique espagnole, dans la lignée des premiers films d'Almodovar, touche par son réalisme et la manière dont il aborde avec simplicité la sexualité des trisomiques. Yo tambien est un petit bijou d'émotion retenue et de sensibilité, en plein cœur de l'été. (Olivier Delcroix)
(Source : Le Figaro par Emmanuèle Frois)
0 Comments:
Post a Comment