Dans le Corse matin du 13/09, un magnifique témoignage de Sylvie Casanova (Présidente de l'association TED et les Autres et future adhérente de l'ASAUS2a) dont les prises en charge adaptées pour Luc et Damien par le biais du groupement A Stella ont tardé à venir..
Ci-dessous l'intégralité de l'article (Source Corse matin A.-c. Chabanon)
Si je ne m'occupe pas d'eux, personne ne le fera à ma place. Je veux leur éviter la camisole thérapeutique ou l'internement en hôpital psychiatrique ».
La voix ne tremble pas. Sur le visage à peine ombré de Sylvie Casanova, l'imperceptible crispation laisse place à un sourire. Coup d'oeil auditif derrière son épaule. Vers l'intérieur de la maison d'où ....
s'échappent les mots de Luc et Damien qui parlent un brin trop haut. Qui viennent de croiser leurs galaxies respectives. Connectés. Dehors, le village d'Afa impose sa tranquillité lumineuse. Roxy, le labrador, rappelle gentiment à l'ordre les deux gamins. Plus loin, la ville pétarade sa routine comportementale presque suspecte.
À 13 ans et demi et 12 ans et demi, Luc et Damien sont des enfants. D'abord. Puis des autistes, comme un simple adjectif. Épithète parfois. Derrière l'enfance, quoi qu'il en soit.
Enfants-statistiques
Ils feront leur rentrée dans un mois au sein de la première UPI - unité pédagogique d'intégration - qui ouvre ses portes au collège Giovoni d'Ajaccio. Jusqu'à présent ils étaient accueillis en Clis à l'école Saint-Jean. Ils font partie de ces enfants-statistiques pour lesquels on cherche aujourd'hui encore des solutions. Et la route sera longue avant d'arriver à faire cohabiter leur monde avec celui dit « normal ». Celui où le curseur est subjectivement calé sur les autres. Ceux dont on dit qu'ils vivent.
Luc, Damien, Sylvie leur maman et Julien leur père, vivent aussi. Ancrés dans une société où ils ont une place qu'ils ont aménagée, bâtie, décorée, embellie.
« Luc est né en février 1996, Damien en novembre 1997, À l'époque où nous avons décidé d'avoir notre cadet, nous ne savions pas pour le plus grand ».
Sylvie, originaire de la région parisienne, et Julien du village de Grosseto, se sont rencontrés à Porticcio, lors d'un congrès, se sont mariés en mai 1997. Au printemps. Presque un symbole car au départ Sylvie ne réussissait pas à tomber enceinte. « Mes deux grossesses se sont bien déroulées. Je n'avais aucune raison de ne pas avoir Damien. Je ne voulais pas que Luc grandisse seul... ».
Les choses se compliquent juste avant la naissance de Damien. Luc tourne en rond, ne parle pas, tripote une ficelle. Il a 20 mois. Le couple réside alors sur le continent. Le chapelet infernal des consultations commence. « Mettez-le à l'école, conseille le pédiatre du moment, tout va s'arranger. ». Rien ne s'arrange. Psychologues, centres d'accueil thérapeutiques, médecins, scolarité à mi-temps... Jusqu'au professeur Messerschmidt à l'hôpital Trousseau à Paris, qui posera, le premier, le diagnostic en 2005. Luc a déjà 9 ans. Entre-temps, le couple s'est installé à Afa.
« Cela faisait un moment que nous voulions nous rapprocher de la Côte d'Azur pour être à proximité de la Corse. Nous avons écrit partout de Perpignan à Menton, mais il n'y avait pas de places, peu d'instituts... Par le biais d'un client de Julien nous avons connu l'IME Les Moulins Blancs d'Ajaccio où exerçait une très bonne éducatrice ».
Une autre dimension
Les premières avancées notables ? À Saint-Jean en janvier 2008. Auparavant, entre 2003, le retour en Corse, et 2008, ce sera IME et Clis pour Luc, hôpital de jour de Castelluccio et 5 écoles pour Damien. « L'école Saint-Jean a été un vrai soulagement, même si l'accompagnement en nombre n'est pas suffisant pour qu'ils fassent des progrès. Nous avons rencontré Jean-Louis Moracchini, inspecteur, conseiller technique du recteur, un homme formidable qui a envie d'agir. Pourtant, la Corse reste la seule région où il n'existe pas de Cra, centre de ressources autisme. Nous sommes obligés d'aller à Marseille ». Elle referait le même chemin Sylvie. Mais irait chercher le diagnostic plus tôt. « Aujourd'hui, Damien serait à l'école primaire sans accompagnement ».
Damien qui la tire par la manche, la regarde droit dans les yeux : « Il existe une autre dimension. J'ai fait des plans, tu veux voir ? ».
Et dans le regard bleu ouvert sur l'océan de ce gamin-là qui sait à peine lire et écrire, on se demande, fugitivement, si ce n'est pas lui, finalement qui a réussi à tisser des ponts entre la terre et un autre espace. Un espace qu'il comprend. Qui le comprend. Où la communication se fait soudain. Une autre dimension. Juste à la sienne. Immense.
(Source Corse matin A.-c. Chabanon)
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